Nous n’avons pas été les premiers à la réclamer (des syndicats l’avaient fait par le passé) mais depuis maintenant près de 3 ans nous demandons la mise en place de la régulation des prix des carburants en Corse.

Le 7 mai 2021, alors que nous l’avions interpellé sur le sujet, le Ministre de l’économie Bruno Le Maire ne s’y était pas opposé. Il a écrit très précisément que l’envisager semblait prématuré.

Cependant le temps presse, les prix explosent et les ménages insulaires subissent de plein fouet la cherté des carburant malgré une TVA de 13% (au lieu de 20% sur le continent).

Pourtant rien n’avance !

Depuis, près de 3 ans nous mettons la pression sur la Collectivité de Corse afin qu’à son tour elle exerce une pression politique sur le gouvernement.  Effectivement les urnes lui confèrent une légitimité plus importante que la nôtre.

Il faut reconnaitre que ce n’est pas gagné tant le conseil exécutif de Corse tergiverse.

Une première délibération sans régulation

Début 2019, après le 1er cycle de réunions organisées dans le cadre de la conférence sociale, l’assemblée de Corse a adopté une délibération n°19/052 (février 2019) dans laquelle la régulation n’est absolument pas mentionnée (tout comme la situation de monopole)

Une seconde délibération avec régulation mais temporaire

Après la publication de l’avis de l’autorité de la concurrence qui pointe du doigt l’existence d’un monopole dans l’approvisionnement et le stockage des carburants en Corse (que nous n’avions de cesse de dénoncer), l’assemblée de Corse par la délibération n° 21/172* a sollicité le Premier Ministre pour une régulation d’une durée de 6 mois.

Pour cela, elle s’est appuyée sur le second alinéa de l’article L-410-2 du code du commerce qui stipule que Gouvernement arrête, par décret en Conseil d’Etat, contre des hausses ou des baisses excessives de prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé.

  • Nous avions expliqué alors que c’était peine perdue car nous n’étions pas dans une situation « de crise, de circonstances exceptionnelles, de calamité publique ni dans une situation manifestement anormale du marché » mais bien de monopole.

Puis une régulation mais uniquement sur les segments soumis à monopole

Le conseil exécutif de Corse a changé sa position pour finalement évoquer une régulation sur les seuls segments soumis à monopole c’est-à-dire l’approvisionnement et le stockage.

La synthèse du groupe de travail du 17 juin (auquel nous avons participé) l’indique clairement :

« Il est également (re)demandé d’effectuer un blocage des prix sur le segment de la chaîne où est constatée en Corse une situation de monopole (approvisionnement et stockage des carburants), conformément l’article L. 410-2 du Code de commerce, qui en ouvre la possibilité »

  • Là, encore nous sommes montés au créneau pour dénoncer le caractère inefficace d’une régulation mise en place uniquement sur l’approvisionnement et le stockage. L’explication est très simple. C’est tout simplement parce qu’il y a des intégrations verticales. Le groupe Rubis possède les dépôts pétroliers de la Corse mais également la société Vito qui, elle-même détient des contrats de distribution avec des stations-services (quand elle n’est pas propriétaire de certaines stations). Donc, il sera facile au groupe rubis de décaler les marges sur les secteurs qui ne sont pas soumis à régulation rendant cette dernière inefficiente

Enfin, retour à la résolution de 2021 c’est-à-dire une régulation temporaire

Finalement, la réunion plénière du 24 juin 2022 a validé un « retour » au dispositif évoqué dans la délibération n°21/172 c’est-à-dire une régulation temporaire de 6 mois !!

Il convient d’ajouter que la délibération n°21/172 faisait mention de deux études

1- Une étude pour que soit élaboré un modèle de développement d’une l’offre individuelle en matière de transport routier « propre », autour de deux axes majeurs :

– La conception d’un modèle économique permettant la distribution sur l’Île de bio-carburants et de carburants moins polluants, type SP95-E10. Ce carburant présentant des difficultés de transport, sa distribution en Corse supposerait la réalisation d’un mélange dans chacun des dépôts et le cas échéant une adaptation des stations-services. En l’absence d’un modèle économique cohérent, cette opération se traduirait par un surcoût supplémentaire alors que le prix du carburant en Corse est déjà plus élevé que sur le continent ;

– Le développement d’un programme d’accompagnement des détaillants, de nature à permettre une diversification de leur offre de service et l’augmentation de l’utilisation de véhicules hybrides (bio-éthanol, électriques, etc.).

2- Une étude d’impact d’un dispositif de fixation des prix sur leur équilibre économique, à travers la modélisation des conséquences d’une rigidité en période d’augmentation ou de diminution du prix du baril.

Les résultats de ces deux études étaient attendus en… octobre 2021 mais depuis plus rien n’a été communiqué.

On le sait le gouvernement se montre déjà frileux concernant la régulation. Si on ajoute une position pas très claire du conseil exécutif de Corse, cela complique les choses.

Pourtant la seule solution pour réduire les prix consiste en une régulation. Une régulation évoquée au 1er alinéa de l’article L410-2 du code du commerce :

« Dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d’Etat peut réglementer les prix après consultation de l’Autorité de la concurrence »

Une régulation sur tous les segments de la distribution de la raffinerie aux stations-services et tant que durera la situation de monopole comme dans les territoires d’outre-mer.  

Nous voulons être clairs. Si l’assemblée de Corse et l’ensemble des parlementaires insulaires n’ont pas une ligne claire et commune sur le sujet, nous sommes certains de ne jamais voir de régulation mise en place.

Pour le moment, nous perdons un temps précieux. Un luxe que de plus en plus de Corses n’ont plus!

**Les groupes Avanzemu – Assemblea di Corsica et Un Soffiu Novu, un Nouveau Souffle pour la Corse Novu ont refusé de participer au vote

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