Le rapport Ecopa commandité par la collectivité de Corse vient d’être rendu public. Et, nous estimions qu’en l’état actuel des choses, il était prématuré de le faire car ce rapport est loin d’être complet.

Nous le savons, il est toujours difficile d’être critique sans que certains ne soient tentés d’y voir une démarche partisane. Pourtant, passer des heures pour décortiquer des bilans et des années d’évolution de prix quotidiens, cumuler des heures des réunions, en prenant sur notre temps libre n’a rien de partisan.

Mais, maintenant que ce rapport vient d’être rendu public, nous nous devons de donner notre avis. Et, nous ne sommes d’accord !

Ce rapport pointe bien une évolution croissante de l’écart depuis 2006. Cependant, quand il doit expliquer l’origine de l’écart, en 2018, il prend l’écart moyen donnant l’impression qu’il faut expliquer un écart constant.
Or, l’écart avec le réseau traditionnel des Bouches du Rhône a varié en 2018 entre :

  • 7.66 c€ HT et 14.66 c€ HT pour le gazole
  • 7.5 c€ HT et 15.39 c€ HT pour le SP95

Le rapport n’explique en rien ces importantes fluctuations.

Commençons par la fin. La fiscalité est un des leviers mais l’actionner en l’état actuel de la plus totale opacité reviendrait à assurer la possibilité de dividendes records aux acteurs de la distribution.
Rien ne peut garantir qu’une baisse de la fiscalité sera intégralement répercutée sur le prix à la pompe.
Rien ne peut garantir, les années passant que les dividendes ne réduiront pas les effets d’un allègement de la fiscalité
Baisser la fiscalité dans ces conditions reviendrait à utiliser la mobilisation (celle des gilets jaunes, la notre) pour booster les dividendes. Ce qui est inacceptable !

Mais pointons les différents postes qui décomposent le prix des carburants en Corse :

1) Le transport maritime
Le rapport Ecopa l’évalue à 2.1 c€/L. Pour rappel, le rapport Vialtis commandité par l’ADEC en 2012 l’évalue à 1.826 c€/L. Soit une augmentation de 0.274 c€/L. Cela ne parait rien mais sur la base annuelle de 350 000 m3, cela fait 960 000 euros.

Pourquoi ce prix ? Est-il justifié ? L’augmentation a-t-elle une explication ? Nous n’en savons rien.

En outre, il semblerait qu’un décret de la préfecture maritime du Var limite la taille des tankers qui approvisionnent la Corse. De fait, ce décret réduit le nombre d’armateurs pouvant approvisionner la Corse ce qui induit un coût plus élevé. Quelle est la pertinence de ce décret? Voilà une question qui mérite réponse!

D’ailleurs, avec le nouvel armateur, la SOCATRA (qui remplace Sea Tanker) le prix du transport va augmenter de 2c€/L !!

Rubis s’en moque puisqu’il lui suffit de répercuter le prix. Pour le consommateur corse, en revanche, ça va être terrible

2) Les Dépôts Pétroliers de la Corse
Le rapport Ecopa l’évalue à 2.6 c€/L. Pour rappel, le rapport Vialtis , en 2012, l’estimait à 2 c€/L. Soit un différence de 0.6 c€/L. Sur la base annuelle de 350 000 m3, cela fait 2.1 millions d’euros.

Devinez! De combien ont augmenté les dividendes de DPLC entre 2012 et 2017 ? Et bien de 2.4 millions d’euros.
L’intégralité de l’augmentation tarifaire semble être passée dans les dividendes.

Et, nous ne résistons pas à adresser un petit message au medef corse dont la position au cours des réunions a été assez étonnante.
En 2017, les dividendes perçus par Total et Rubis se sont élevés à 10.7 millions d’euros. 10.7 millions qui ont été confisqué à l’économie insulaire. Nous aurions pu penser que le Medef Corse, soucieux des intérêts des entreprises corses, en aurait été sensibles. Pas du tout !
Drapé dans une posture libérale, il a estimé qu’il était normal qu’une entreprise fasse des dividendes. Et, si ces derniers ont augmenté de 280% entre 2012 et 2017, c’est que nous avons affaire à de formidables gestionnaires.
Mais, le Medef Corse, aussi étonnant que cela puisse paraître, ne sait pas ce qu’est le libéralisme.
En effet, le père du libéralisme David Ricardo fustigeait les marchés de rentes. Or un marché de rentes est un marché où la concurrence ne s’exerce pas librement. Exactement ce qui se passe dans la distribution des carburants !
Devoir expliquer le libéralisme au Medef… un comble!

3) Le transport routier
Le rapport Ecopa l’estime à 1.5c€/L soit le même montant que le continent. Pour rappel en 2012 l’estimait à 1.2 c€/L, soit une augmentation de 0.3c€/L. Sur la base annuelle de 350 000 m3 cela fait 1.05 millions d’euros.

Plus étonnant, si le rapport Vialtis pointait, en 2012, une différence avec le continent (1.5 c€/L en Corse pour 0.75 c€/L sur le continent), le rapport Ecopa, lui, considère que le coût du transport routier est identique.

Identique ?! Mais alors quid de l’argument du directeur de Vito Corse ? Celui qui consiste à dire, à longueur d’interviews, que les routes sinueuses insulaire avaient un poids dans la cherté des carburant en Corse ?! Lui aurait on menti à l’insu de son plein gré ?

A ce stade, entre 2012 et 2018, l’augmentation du prix du transport maritime, des dépôts pétroliers de la Corse et du transport terrestre entre le rapport Vialtis et le rapport de la région représentent 4 millions d’euros soit 1.14c€/L
Et nous n’avons eu aucune explication sur la pertinence des prix pratiqués ni aucune justification sur leurs augmentations.

La suite de notre critique dans notre prochaine publication